vendredi 28 octobre 2022

Ils avaient dit du vert et du jaune jaune... 🌳💛🍾🥂 !!!


Ils avaient dit du vert et du jaune. Tous ensemble, et tous en couleurs pour la convention régionale. Les salariés avaient reçu un mail du service de la communication qui vivait là ses  très riches heures, avec une pièce jointe pour détailler le programme, le lieu du rendez-vous, l'accès et les covoiturages proposés. La page était saturée de points d'exclamation, agrémentée de petits dessins festifs, coupes de champagne, gâteaux, smileys hilares. Et puis, tout en bas de la page, le rappel du dress code : décontracté et coloré, vert et jaune, rappel du logo de la société. Quelques mots encore sur la fierté d'appartenir, et,  tout en bas, souligné de deux traits : présence obligatoire.
Au-dessus des ordinateurs, ça avait été un mélange d'effervescence et de réserve. Pas dupes, non, amusés, à peine, mais une journée sans ordinateur, à la campagne, champagne offert, après tout, autant voir les choses du bon côté.... Je passe te prendre ? Hâte de voir le DG en jaune poussin ! Et lui, tu l'imagines déguisé en perroquet ?
C'était le mois dernier, celui d'avant la chute. Clara avait soupiré. Fugitivement, elle avait envisagé une cheville foulée, une entorse, impossible de poser le pied par terre ou quelque chose de ce genre, de vraiment empêchant, bien visible et socialement acceptable. Elle s'était souvenue combien elle avait toujours eu horreur des déguisements, en chat, en fleur ou en écureuil, pour les fêtes d'école, les spectacles de théâtre et de danse de fin d'année. La dernière sur scène et la première dans les coulisses. Pas envie de revivre ça. Et elle n'avait rien de jaune ni de vert dans ses placards, couleur absente de sa palette. Jamais eu envie de ressembler au drapeau brésilien. Et le jaune, elle trouve que ça ne lui va pas au teint.
Il avait fallu s'exécuter, ne pas faire preuve de mauvais esprit de meneuse rebelle. Se montrer positive et corporate, faire apprécier son potentiel. Mais depuis un moment, elle n'a plus envie. Une lassitude, sans se l'avouer. Un ressort détendu. Ça va passer. Un blues automnal, les jours qui décroissent, les vacances déjà loin, pas grand-chose..
En arrivant sur les lieux, un hôtel impersonnel, cimenté et cubique, spécialisé dans l'accueil des groupes et séminaires, dans un écrin de verdure comme le précisait son site Internet pour qualifier le morceau de pelouse et les quelques arbres dressés à l'arrière du bâtiment, elle avait eu un instant d'arrêt. Comme une vision. Et puis non, elle avait réalisé que ce n'était pas une vision. Des êtres jaune et vert surgissaient de toutes les voitures et pressaient le pas vers le bâtiment. Clara avait renoué son foulard jaune trouvé sur un marché pour quelques euros, en se promettant de le transformer en chiffon de ménage à la fin de la journée. Un sweat-shirt kaki, tout détendu, c'est tout ce qu'elle possédait de vert. Un jean, kaki aussi, et ça irait bien comme ça.

Café d'accueil en thermos, batterie de tasses en faïence blanche, touillettes en plastique et sachets de sucre en poudre, corbeilles débordant de viennoiseries et de chouquettes, le mot de bienvenue du directeur régional, ventre tendu sous un polo jaune vif assez disgracieux, et l'inévitable succession de PowerPoints sur les objectifs, les résultats, la performance et le fameux ADN du groupe. Puis un type inconnu de tous avait pris la parole, un invité de marque avait-il été précisé, intervenant rémunéré pour la circonstance, coach d'entreprise, consultant en performance commerciale, en motivation, et préparateur mental. Il parlait fort, avec de grands gestes de télé évangéliste, avec des mots qu'il répétait tout le temps en désignant du doigt l'un ou l'autre dans la salle, mi-gêné, mi-ravi de se voir ainsi, l'espace de quelques secondes, sorti du rang. Vous êtes des samouraïs, des guerriers, martelait-il en boucle devant un auditoire silencieux qui n'attendait que le buffet promis à treize heures.

Clara regardait autour d'elle le chaos des couleurs, jusqu'au vertige. Des jupes jaune citron à volants, rescapées des valises de vacances, des robes vert pomme, des chemises moutarde, des pantalons vert sapin, du bouton d'or, du pissenlit, du safran, du jaune d'œuf, dans une étourdissante profusion de nuances mal accordées. Elle avait failli sortir, prendre l'air, laisser les apprentis samouraïs ensemble pour aller boire un verre d'eau aux toilettes, mais elle avait renoncé, trop de monde à déranger pour quitter sa travée, elle était coincée.
Le télévangéliste, à l'acmé de son rôle, micro soudé au poing, croissait en volume sonore, avec un trop grand sourire dégainé toutes les deux phrases. Les minutes passaient comme des heures, immobiles, de ces heures de salle d'attente, de salle d'embarquement, de transports à en commun, de ces heures contraintes où il faut se livrer à des efforts surhumains pour s'en extraire en pensées.

😎🙂
Extrait de :
"Ce matin-là"  Gaëlle JOSSE


samedi 15 octobre 2022

Alléluia ?


 Quel titre donneriez-vous à cette "oeuvre" ?

-Fils n°2 (par ordre d'apparition sur terre) suggère : L'élévation de l'infra-monde ! et ajoute "je le trouve très contemporain, tu peux en faire un NFT" ! Bon, au moins j'aurais appris ce qu'est un NFT :-)

NFT (non fongible token) : certificats numériques infalsifiables qui attestent l'authenticité d'un objet virtuel.

-Fils n°1 propose : Ramifications

mercredi 12 octobre 2022

Debout


J'ai décidé de vous raconter un de mes rêves après avoir vu la photo Céleste de la méduse aux deux jambes ici : 

 https://celestinetroussecotte.blogspot.com/2022/10/a-sete-hier.html.

Célestine y écrit un texte magnifique suite à l'enterrement de son neveu.

Cet été, au mois d'août j'ai assisté à l'enterrement de la maman d'une amie. La cérémonie avait lieu dans un crématorium récent jouxtant un cimetière. La vue était belle, un chat accueillait les gens dans l'entrée. J'avais eu une pensée pour un copain de mes fils qui avait été enterré dans ce crématorium suite à son suicide il y a plusieurs mois. Mes fils n'avaient pas voulu assister à cette cérémonie à l'époque. Leur ami était devenu paraplégique depuis quelques années suite à un accident. Je ne l'avais jamais rencontré ni vu d'ailleurs ; je n'en avais qu'entendu parler depuis son accident.

Et moi, là, je souffrais de mon entorse avec arrachement oseux et rupture d'un ligament croisé. Lorsqu'il a fallu aller dire un dernier adieu et se rendre devant le cercueil de la maman de mon amie, j'ai décidé de n'utiliser qu'une seule canne anglaise, côté opposé à l'entorse.Un peu à mes riques et périls !... Puis j'ai rejoint l'autre canne restée dans la salle contre une chaise. Ces cannes rendent bien des services mais ne font que tomber généralement dans un bruit fracassant ! Il faudrait inventer un aimant universel pour les coller n'importe où ! 

Deux ou trois jours après cet enterrement, pendant la nuit, en rêve, un jeune homme lié à ce cimetière (enterré là ou pas ? ) est venu me voir. Il était debout, moi aussi, et il m'a dit : "J'étais en plein questionnement". Puis il m'a serré très chaleureusement dans ses bras (les sensations sont indiscibles, c'était tellement...). Le rêve s'est arrêté là. J'en garde un excellent souvenir :-)

Le matin au réveil, je me suis demandée quel jeune pouvait être enterré dans ce cimetière, ou quel jeune avait eu une cérémonie d'enterrement là. Je n'avais aucune explication... Puis j'ai après quelques jours pensé au copain de mes fils. Lorsque je les ai vu, je leur ai demandé s'ils avaient une photo de lui. Ils m'en ont montré plusieurs ainsi qu'une vidéo. Je l'ai reconnu.... le jeune homme venu me voir dans le rêve était bel et bien leur ami... Et il allait bien, était complètement serein et avait retrouvé l'usage de se jambes.

 https://chacunytrouverasonconte.blogspot.com/2021/10/

La magie de la pleine lune