Les livres m'ont sauvée.
Dans mon appartement d'éternelle étudiante, j'avais face à face deux bibliothèque. Aujourd'hui encore, d'ailleurs, elles ont juste grandi. La première était à gauche en entrant, avec dedans et dans un grand désordre tous les livres encore non lus et dans laquelle on pouvait piocher à son gré. Des livres, j'en achetais, on m'en offrait, ou j'oubliais d'en rendre. La deuxième, à droite, contenait ce que j'avais lu, aimé et amplement anoté (donc précieux), cela si bien rangé qu'en moins de 5 secondes je pouvais retrouver n'importe quel bouquin. Mon amoureux s'amusait à le vérifier sur la trotteuse de sa montre. Les livres passaient donc de gauche à droite-dans le sens de l'écriture, m'avait-il fait remarquer-au fur et à mesure qu'ils étaient lus. Mais curieusement, si la bibliothèque de droite gonflait, celle de gauche ne maigrissait pas pour autant. Elle semblait se renflouer au même rythme qu'elle perdait des livres.
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Au moment du plus grand désespoir-enfin le croit-t-on, on ignore si l'avenir ne nous en réserve pas de pire-surgit parfois l'événement ou la personne qui nous relève. Encore faut-il tenir sur le barreau de l'échelle de la douleur jusqu'à ce moment-là. Louis tenait bon.
(et enfin un nouveau directeur de l'Institut des jeunes aveugles arrive... note de moi-même !)
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Les années s'écoulent. Le docteur Pignier comprend que Louis s'étiole de ne pouvoir apprendre. Le voir ainsi le désole. Désemparé il finit par demander conseil à son élève : de quoi lui et ses camarades ont-ils besoin pour aller mieux ? Louis revient le voir après quelques jours. Il s'est souvenu de sa mère, entourée d'enfants, un livre ouvert sur ses genoux. Ce qu'il propose est si simple ! Comment ne pas y avoir pensé plus tôt ? se dit Pignier.
Puisque les élèves n'ont pas accès aux livres, alors il faut leur en lire, à tout moment, en tout lieu, hors des heures de classe, et autre chose que des manuels scolaires, mais des livres d'aventure, ceux qui font rêver les enfants. Le directeur instaure au pensionnat la lecture pendant les repas- c'est lui qui s'en charge-, puis les soirées lecture dans le dortoir. Pendant ces longues heures, entre le coucher et le sommeil, jamais animées jusque-là, M. Claude vient désormais lire des romans au pensionnaires. La vie des autres entre dans la leur. Jamais ils ne seront des explorateurs intrépides, mais le temps du livre, il le deviennent.
Les choses s'améliorent.
Extraits de Les mains de Louis Braille - Hélène Jousse
D'autres ont été sauvés par la musique
