dimanche 25 avril 2021

Au camping des flots bleus j'me traîne des tonnes de cafard

 Il est parti


les autres femmes sont pour ainsi dire vivantes, ce qui ne signifie pas qu'elles vivent. leurs maris jouent les bons vivants.
quand l'un d'eux meurt d'une cirrhose au lieu du cancer, ça fait un changement. ça permet d'échanger des symptômes exotiques. parfois, à l'heure des courses, une jeep transporte un bûcheron ensanglanté à l'hôpital.
comme une seule bouche, un cri horrifié s'échappe alors des femmes légalement enceintes. elles pressent leurs mains sur leurs ventres fragiles et hop-hop clopinent jusqu'à la maison, retrouver leurs mères et autres parentes. elles enfouissent leurs têtes dans divers girons, craignant pour leurs mioches à naître qui risquent, après une telle vision, une malformation à la naissance. 
aussitôt dans les divers foyers on allonge les grossesses légales, évoquant le futur bébé, puis on les couve chaudement. des consolations sont prodiguées, la plupart disent que ça aurait pu tomber sur le mari, mais que dieu soit loué c'est tombé sur un étranger dont la petite femme est sûrement en train de pleurer toutes les larmes de son corps. bientôt les larmes tarissent, les ventres frémissants s'apaisent peu à peu, les nez -- sni-snif -- reniflent rassérénés.

LES AMANTES - Elfriede Jelinek


(photo prise sur le même site et le même jour que ma photo édulcorée)


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Fraise en devenir et ciboulette